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05 avril 2023

Vers un pôle archéologique

2. L'ensemble cultuel de Saint-Martin-au-Val

 

Deuxième volet d’une série de cinq articles consacrés à l’histoire du quartier Saint-Brice, aux découvertes archéologiques qui y ont été faites, à son patrimoine et à son futur Pôle archéologique.

 

Cet ensemble de bâtiments religieux de plus de 11 ha a connu ses heures les plus fastes à la fin du Ier siècle de notre ère et durant tout le IIe siècle, avant de péricliter au milieu IIIe siècle. Il se développe à l’extérieur du grand fossé qui ceinture la ville d’Autricum, là où la vallée s’élargit pour former un vaste amphithéâtre naturel tourné vers l’Eure. Les fouilles, conduites depuis 2006 par la Direction de l’archéologie sur le terrain des anciens abattoirs, complétées par des prospections géophysiques* et le suivi systématique des travaux effectués dans le quartier, ont permis de mieux appréhender trois édifices dont la monumentalité témoigne du rayonnement de la cité au sein du territoire carnute et de l’empire. Pèlerins et fidèles venaient y déposer des offrandes, participer à des banquets et faire part de leurs vœux aux dieux du Panthéon romain.

Le temple à galeries

La construction du bâtiment principal (300 mètres par 200 mètres) débute par la mise en place d’une immense plateforme. Pour ce faire, le coteau est entaillé à l’ouest et rehaussé sur sa moitié orientale. On commence par ériger un grand temple, agrémenté d’imposantes galeries, dont les colonnes atteignent 11 mètres de hauteur, reliées par des pavillons à chaque angle. A l'est, la façade principale — par laquelle arrivaient les pèlerins — est rythmée par une alternance de pièces annexes semi-circulaires et rectangulaires. Au centre du monument, une grande cour accueillait l’autel** sur lequel les sacrifices d’animaux étaient pratiqués.  Le temple, que l’on restitue au milieu de la galerie ouest, était réservé à la statue du dieu principal, et seuls les prêtres pouvaient y accéder. En l’état actuel de la recherche, cette divinité n’est pas connue.

Le portique de façade et l’édifice d’Apollon

Plus à l’est, se déploie une galerie d’au moins 160 mètres de long, entrecoupée par deux bâtiments. Sa vocation est difficile à déterminer, d’autant que seul l’édifice nord a pour l'heure fait l’objet d’une fouille approfondie. De plan carré, ce dernier mesure 25 mètres de côté. Il présente un podium central où était vraisemblablement pratiqué un culte à Apollon Vatumogons (Apollon devin), comme semblent en témoigner deux inscriptions gravées, l’une sur un socle de statue, l’autre sur une plaquette en marbre.

Tablette dédiée à Apollon Vatumogons

Le bâtiment à bassins

Un grand bâtiment de 34 mètres par 19 mètres prend place directement en contrebas de l’édifice d’Apollon. Richement orné de fresques et de moulures en marbres provenant de Gaule, d’Italie et de Phrygie (Turquie), il renferme deux splendides bassins d’apparatqui encadrent et mettent en valeur un bassin central plus profond et au décor plus sobre. Ce dernier était probablement dédié aux ablutions, rituel préliminaire obligatoire avant toute présentation devant les dieux. En plus de ces bassins, ce bâtiment a livré les restes inédits et particulièrement bien préservés d’un plafond à caissons suspendus en bois. Sculpté et peint, celui-ci témoigne d’une élégance esthétique certaine et d’un savoir-faire extrêmement abouti.
Les recherches sur le sanctuaire de Saint-Martin se poursuivent et il est certain que les découvertes à venir apporteront un éclairage nouveau sur la genèse de ce site majeur, ainsi que sur le ou les dieux qui y étaient vénérés.  

Vue aérienne d'un des deux bassins d'apparat

Fragment d'un caisson hexagonal du plafond suspendu, découvert dans un des deux bassins d'apparat

Restitution d'un caisson hexagonal

Glossaire

* Prospection géophysique : détection non invasive des vestiges en sous-sol par des mesures de résistivité électrique ou magnétique.

** Autel : Table en pierre sur laquelle les offrandes aux Dieux sont déposées et les sacrifices pratiqués.