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La cathédrale Notre-Dame de Chartres
Les secrets du choeur !
Responsable scientifique : Jérémie Viret
En 2010, à l’occasion de la restauration des enduits peints de la cathédrale de Chartres, la Direction de l’archéologie de Chartres métropole a été appelée pour surveiller en urgence le débouchage des trous de boulins (pièces d’échafaudage en bois) et des percements visibles dans les murs et les voûtes du haut-chœur.
De l'identification à une interprétation difficile
Les trous de boulins correspondent aux encastrements aménagés dans la maçonnerie pour maintenir les échafaudages utilisés lors de la construction du bâtiment. Ils constituent des aménagements fréquents dans les édifices du moyen âge, faciles à identifier et interpréter. Les multiples percements qui traversent les voûtes sont en revanche plus énigmatiques. Ces trous de plan circulaire ou oblong se rencontrent fréquemment dans les voûtes des édifices religieux. L’étude des percements de la cathédrale de Chartres montre que la majorité des 152 percements qui constellent les voûtes du chœur est réalisée après la mise en place du badigeon du XIIIe siècle mais avant une campagne de restauration des peintures des voûtes au XVIe siècle. Presque tous portent des traces d’usures liées au passage de cordages ou de chaînes qui indiquent qu’ils étaient utilisés pour pendre ou hisser des objets.
L’interprétation de leur fonction précise reste délicate. Ces percements sont parfois associés à la phase de construction de l’édifice. Dans cette hypothèse, ils servaient à laisser passer les filins auxquels étaient accrochés les cintres utilisés pour construire les arcs et les voûtes des édifices religieux. Après leur construction, ces pièces de bois pouvaient être descendues jusqu’au sol grâce à des poulies accrochées à la charpente. Cette dernière était en effet construite avant le voûtement. On pense aussi que ces percements correspondent à la suspension de luminaires à travers la voûte pour l’éclairage de l’église comme c’est encore le cas pour l’éclairage du chœur aujourd’hui.
Une relation étroite entre liturgie et architecture
Un compte de la cathédrale de 1415-1416 mentionne des lustres (appelés couronnes) et des lampes nécessaires à l’éclairage du maître-autel. Il est également fait mention de l’achat de poulies pour les manœuvrer. Ces luminaires devaient en effet être montés et descendus pour allumer ou éteindre les bougies qu’ils portaient.
Cet exemple montre la relation étroite qui existe entre la répartition des percements de la voûte et le plan du choeur et de ses aménagements au sol. On remarque en effet que des groupements importants de percements se situent à l’emplacement d’autels aujourd’hui disparus (voir plan). Ainsi l'alignement de trous dans la travée axiale du rond-point serait en relation avec l'autel des Saints-Forts. Une autre concentration de percements, situés à l'entrée de l'abside, est peut-être liée à un ancien emplacement du maître autel. D’autres correspondent à l’emplacement d’un clocheton localisé au-dessus du chœur et détruit probablement durant la révolution française. Dans ce cas, les percements étaient utilisés pour faire passer les cordages qui actionnaient les cloches appelées commandes destinées à prévenir les sonneurs des clochers de façade des moments où il fallait actionner les grosses cloches.
La profusion de percements traduit les nombreuses modifications de l'organisation liturgique du choeur. Certains pourraient même être liés à des événements ponctuels. Ainsi, les représentations du sacre d’Henri IV à Chartres montrent un dais qui semble suspendu par des cordes à ses quatre coins.
Bien que nous n’ayons trouvé aucune mention pour Chartres, les exemples de plusieurs autres édifices religieux indiquent que les trous de la voûte pouvaient aussi être utilisés pour la suspension d'ex-votos.
L'entretien de l'édifice
Enfin, plusieurs de ces percements tenaient un rôle dans l'entretien et la restauration de l'édifice comme l'attestent les comptes de l'œuvre de 1415-1416. Il y est fait mention de la mise en place d'une corbeille qui devait pouvoir descendre et monter à l'occasion de la restauration de la verrière de Saint-Lubin près du clocher nord. Les percements positionnés à proximité des murs gouttereaux (murs latéraux de l’église), visibles dans le chœur, comme dans la nef, correspondent probablement à cet usage. Il faut noter que ces percements ont été systématiquement gainés de bois pour leur assurer une durée de vie plus importante. La fragilité des verrières nécessitait un entretien fréquent qui explique que ces perforations aient été conservées jusqu'à une époque récente. Un texte du XVIIIe siècle parle aussi de faire « araigner » c’est à dire nettoyer les voûtes. Bien que cela ne soit pas spécifiquement précisé, on peut supposer que ce nettoyage a pu être réalisé en partie depuis des nacelles. Les deux grands programmes de restauration du décor peint, vraisemblablement au XIVe et au XVIIIe s., ont nécessité d'accéder aux voûtes. L'utilisation des percements pour y pendre des nacelles ou pour soulever des matériaux est probable.
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