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06 mai 2024

Etude d'un crâne de chat retrouvé lors d'une fouille à Chartres

Un travail archéozoologique autour des chats

Elise Andresen est étudiante à Paris I en deuxième année de Master (encadrement : Annelise Binois –maître de conférences à Paris I – Panthéon Sorbonne). Début avril, elle est venue passer deux jours au sein de nos locaux afin de réaliser une étude comparative sur des crânes de chats de l’époque médiévale, mettant en parallèle des crânes mis au jour à Beauvais, avec ceux provenant d’une fouille rue Fulbert, à Chartres.

Un peu de contexte

Le site de la rue Fulbert, situé à une cinquantaine de mètres la cathédrale, a été fouillé entre 1972 et 1986. Les recherches archéologiques ont révélé des vestiges de la ville antique, médiévale et moderne. Au sud, près de la rue Serpente, trois fosses dépotoirs ont été mises au jour, dont l’une d’entre elles a livré de nombreux restes osseux de chats et de moutons.

Fouille de la rue Fulbert effectuée entre 1972 et 1986 (© Dominique Joly)

Ces restes de squelettes de chats, retrouvés à Chartres, et datés entre le XIIe et XIIIe siècle, partagent beaucoup de similitudes avec les crânes de chats retrouvés à Beauvais, qu’Elise étudiait déjà. Ces derniers sont datés à partir du XIIIe siècle, allant jusqu’au XVIIIe (voire XIXe) siècle. On retrouve alors une certaine continuité entre les deux fouilles, mais également des similitudes dans l’étude de ces crânes.

Les objectifs

Le but de cette étude de corpus, est, pour Elise, d’intégrer des données supplémentaires à son mémoire « Présence et rôle du chat dans les sociétés au Moyen-Age et à l’époque moderne : une étude archéozoologique », en mettant en place plusieurs méthodes.

Ainsi, un des objectifs premiers a été de déterminer si ces chats appartenaient à une population de chats « sauvages » dits Felis Silvestris, ou de chats « domestiques » dits Felis Catus (l’ancêtre du chat domestique). Dans un second temps, Elise a également cherché à déterminer le sexe et l’âge des chats pour mieux comprendre leurs conditions de décès.

En parallèle, Elise, aidée de Julie Rivière ainsi que d’Aurélie Claude, respectivement archéozoologue et archéologue au sein de C’Chartres Archéologie, a expérimenté plusieurs techniques sur la mesure et l’interprétation de ces ossements afin de comparer ces méthodes, et observer, parfois, différents résultats.

 

Mesure d'un crâne de chat par Elise Andresen

Les méthodes et résultats

Parmi tous les procédés employés, Elise, Julie et Aurélie ont d’abord pris des mesures directement sur les crânes de chats.

Elles ont notamment expérimenté une vieille méthode, qui consiste à verser des grains de polenta directement dans les crânes. Intrigante mais pas anodine, elle permet, après avoir récupéré le contenu versé dans chaque crâne, de mesurer et comparer la capacité endocrânienne de ces derniers.

 

Technique de mesure à l'aide de polenta

Avec toutes les données collectées, il a pu être déterminé que la majorité des crânes de chats, de Beauvais comme de Chartres, appartenaient à des chats de l’espèce Felis Catus, présentant une boîte crânienne naturellement plus petite que celles des Felis Silvestris.

La détermination du sexe s’est avérée complexe à préciser, cependant, il a pu être observé que l’âge d’abattage pour les 12 chats de la fouille chartraine était particulièrement jeune, tous âgés de maximum 2 ans. Des traces de découpe ont également été observées sur les museaux.

Quelques hypothèses…

 

Mise en comparaison des différents crânes étudiés

Ces résultats ont permis d’arriver à plusieurs hypothèses, notamment sur les ossements de chats retrouvés à Chartres. Il aurait pu y avoir un abattage de chats à des fins de commercialisation de leur fourrure. La fouille effectuée rue Fulbert dans les années 70-80 pourrait ainsi témoigner d’une activité de pelletier (préparation des peaux destinée à les transformer en fourrure) et de peausserie (travail des peaux, du cuir).

L’hypothèse d’un élevage reste à étayer mais parait plus que probable au vu de la forte sélection des âges d’abattage.

En effet, au XIIe et XIIIe siècle, la fourrure est largement employée, et celle du chat est particulièrement appréciée pour sa capacité à réguler la chaleur corporelle. De plus, des ossements de jeunes moutons ont également été retrouvés au cours de cette fouille, probablement à des fins de production.

Si un besoin en fourrures et en peaux issues d’espèces domestiques est manifeste à cette époque, la question relative au contexte de production reste à déterminer, afin de préciser qui était les artisans, quelles productions découlaient de la transformation de ces produits et vers quels marchés étaient-il destinés ?