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25 avril 2025

Prospection archéologique dans la collégiale Saint-André

Jimmy Rossignol et Stéphane Willerval, respectivement topographe et archéologue à C’Chartres Archéologie, accompagnés d’Antoine Louis, archéologue topographe au Conseil départemental d’Eure-et-Loir, sont intervenus cette semaine à la collégiale Saint-André.

Leur travail avait pour objectif de relever les vestiges d’un édifice de spectacle antique encore visible dans la crypte de la collégiale. Plus largement et dans le cadre d’un programme de recherche, leur travail porte sur cet édifice de spectacle qui reste à ce jour encore très mal connu. Il vise à identifier la nature de cet édifice, à établir sa chronologie et à préciser son architecture :

- En relevant l’ensemble des vestiges encore présents dans le quartier.

- En réalisant des prospections géophysiques pour cartographier les vestiges conservés sous les niveaux de sol actuel.

- Et en reprenant les données des fouilles anciennes.

Au préalable de ce programme, l’équipe d’archéologues a d’abord réalisé une synthèse des découvertes anciennes.

Historique des observations du XIXe siècle à nos jours

Cette synthèse montre que dès 1870, de nombreuses observations archéologiques sont réalisées dans le quartier Saint-André et indiquent la présence d’un édifice de spectacle.

En 1965, au moment de la construction de la résidence de la Brèche, Marcel Couturier, président de la SAEL (société archéologique d'Eure-et-Loir), observe notamment deux murs courbes aux dimensions importantes. Dans le même temps, il reconnait dans la crypte de la collégiale Saint-André des maçonneries qu’il identifie à l’édifice de spectacle.

En 1967, Paul Courbin, professeur de l’EPHE (Ecole Pratique des Hautes Etudes), entreprend des fouilles au nord de la collégiale avec pour objectif de retrouver les murs observés en 1965 par M. Couturier. En plus des deux murs observés précédemment, P. Courbin dégage un troisième mur plus à l’ouest.

1. Plan de Jean Laurent mettant en évidence par les points g et h les murs observés dans la crypte

En 1983, dans un article publié dans les bulletins de la SAEL, Jean Laurent figure sur un plan (cf. visuel 1) les maçonneries reconnues par M. Couturier dans la crypte de la collégiale mais ces dernières ne sont pas documentées.

Relevé des vestiges dans la crypte de la collégiale et le quartier Saint-André

A partir de ce constat, le premier objectif de l’équipe était de vérifier les observations antérieures. Il s’agissait ensuite de réaliser une collecte et un enregistrement complet des données.

2. Maçonnerie visible dans la salle nord de la crypte

L’équipe d’archéologues a donc d’abord engagé un travail dans la salle nord de la crypte de la collégiale. La maçonnerie encore présente (cf. visuel 2) dans cette pièce appartient vraisemblablement à la fondation du mur de façade de l’édifice de spectacle antique. La largeur de cette fondation, construite avec des blocs de silex assisés et noyés dans le mortier, laisse peu de doute sur son appartenance à un édifice public monumental.

3. Maçonnerie visible de part et d'autre de l'escalier sud de la crypte

Un second mur visible également de part et d’autre de l’escalier sud d’accès à la crypte (cf. visuel 3) a ensuite mobilisé l’équipe. Probablement en partie détruit lors de la construction de l’escalier, cette seconde maçonnerie pourrait être le prolongement du mur présent dans la salle nord.  Le report sur un plan général permettra peut-être de confirmer cette hypothèse et de proposer la restitution d’un mur continu entre la salle nord et l’escalier sud.

Si le travail engagé a été l’occasion d’une première acquisition des données (relevés photographique, photogrammétrique et lasegrammétrique), en dégageant une partie des zones à étudier des déblais qui les encombraient et en mettant en évidence les maçonneries, il se poursuivra dans les semaines à venir par des relevés en plan, en élévation et par l’enregistrement de données complémentaires.

L’hypothèse d’un amphithéâtre antique

Enfin, il faut aussi préciser que la synthèse des découvertes, réalisée en amont des prospections, a permis à l’équipe de formuler et d’écarter certaines hypothèses et qu’à partir de celles-ci, les archéologues ont pu orienter leurs recherches.

Les archéologues ont ainsi écarté l’hypothèse d’un théâtre. Par comparaison avec d’autres théâtres connus en Gaule (Lyon, Vienne, Orange), la cavea (les gradins) est adossée à la pente (ici la rue du cloître Saint-André) et le mur de scène est positionné à l’opposé de la cavea, soit ici, vers la vallée, du côté de l’Eure. Mais les murs courbes observés en 1965 et 1967 ne plaident pas en la faveur de la présence d’un mur de scène vers la vallée et amènent donc à écarter l’hypothèse d’un théâtre.

En revanche, et en dehors de l’hypothèse de l’amphithéâtre qui est retenue par l’équipe, la possibilité d’avoir un amphithéâtre à fonction mixte, avec une scène aménagée à l’intérieur, comme c’est le cas à Lutèce (Paris), n’est pas complétement écartée.

Les recherches menées aujourd’hui par l’équipe de C’Chartres Archéologie et du Conseil départemental d’Eure-et-Loir permettront non seulement d’éclairer cette question et de mieux comprendre cet édifice antique, mais aussi d’offrir aux habitants de tout un quartier (et même plus largement d’une ville et d’une métropole) l’occasion de se réapproprier leur histoire.