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Retour à la dernière glaciation
Il y a 20 000 ans, un climat particulièrement froid et aride
Dans un paysage où pins sylvestres, bouleaux et saules sont entourés de graminées sauvages, de genévriers et de chardons, les températures moyennes sont inférieures de 15° par rapport aux températures actuelles. Les précipitations sont beaucoup moins abondantes mais, le sous-sol est gelé en permanence comme actuellement au Nord du Canada ou en Sibérie.
Les conditions climatiques sont encore plus rudes au nord du continent eurasiatique, occupé par un énorme glacier bordé par un désert froid, entrainant une migration d’espèces vers le sud.
Toutefois, l’homme a parfaitement survécu dans ce milieu, malgré tout riche en faune et en matière première.
Temps de mammouth
Au cours de la Préhistoire, le paysage n’a cessé d’évoluer. Ceci est dû essentiellement aux cycles astronomiques qui entrainent des changements de climats.
Ces différents cycles ont des variations de 400 000 ans (excentricité de l’orbite terrestre), 40 000 ans (inclinaison de l’axe de rotation de la Terre), et de 26 000 ans (précession des équinoxes liée au mouvement de toupie de la Terre). Ils influencent la position de notre planète par rapport au Soleil, et donc l’inclinaison et l’intensité de ses rayons, mais modifient également le déplacement des masses atmosphériques et de facto des courants marins.
Ces modifications impactent totalement le climat et la végétation des zones polaires comme tropicales entraînant la migration des animaux et des humains.
Les animaux vivant au chaud migrent vers des régions plus clémentes quand le climat devient glaciaire et inversement. Le mammouth laineux venant de Sibérie, particulièrement bien adapté au froid, supplante les autres en Europe, il y a environ 200 000 ans.
Mammouth, une longue (pré)histoire
Les mammifères à trompe (proboscidiens) existent depuis 60 millions d’années et incluent les plus grands mammifères terrestres ayant vécu (les mammouths parmi d’autres espèces fossiles) ou vivants (les éléphants).
Les plus anciennes espèces de mammouths sont africaines et datent de 4 à 3 millions d’années : Mammuthus subplanifrons et africanavus. En Eurasie, le doyen est le mammouth méridional (Mammuthus meridionalis) arrivé il y a 2 millions d’années.
Certains, à partir de – 600 000 ans évoluent en mammouth des steppes (Mammuthus trogontherii) qui vit jusqu’à - 200 000 ans.
Au gré des variations climatiques, d’autres gagnent l’Amérique du Nord il y a 1,5 million d’années où ils évoluent en Mammuthus columbi puis en Mammuthus exilis, espèce naine vivant à - 30 000 ans sur les îles californiennes.
Descendant du mammouth des steppes, le mammouth laineux (Mammuthus primigenius) apparaît en Sibérie puis s’étend à l'Ouest autour de - 200 000 ans et en Amérique du Nord. Il disparaît il y a 10 000 ans mais une variété naine survit 6 000 ans de plus sur une île arctique.
De gauche à droite : moulage de dent de mastodont (Anancus Avernensis), dent de mammouth méridional (Mammuthus meridionalis), de mammouth des steppes (Mammuthus trogontherii), de mammouth laineux (Mammuthus primigenius) et molaires d'éléphant
Le squelette monté de Mammuthus primigenius
Ce squelette monté a été découvert dans les années 1990 aux confins de la Sibérie orientale, au-delà du cercle polaire sur la côte arctique, à 200 km à l’ouest des îles Medveji. Il appartient à la dernière espèce de la lignée des mammouths : Mammuthus primigenius. Ce spécimen a été daté au radiocarbone à environ 30 000 BP (Before Present). Il s’agit d’un mâle de près de 50 ans, avec une taille comparable à celle de l'éléphant d'Afrique : 4,70 mètres de long pour 2,80 mètres de haut et 2 mètres de large. Ces défenses atteignent près de 2,50 mètres de long.
Les restes de tissus organiques, encore présents sur certaines parties osseuses, sont les indices d’une congélation de l’animal, après sa mort, suivie d’un enfoncement du corps dans le permafrost. Ils ont fait l’objet récemment d’un prélèvement pour une étude paléogénétique (en cours) afin de mieux connaître la diversité biologique de cette espèce.
Ce squelette de mammouth laineux fait partie de la collection de l’Administration des Biens du Prince Souverain Albert II de Monaco. Il a été déposé par le Palais Princier en 2013 au Musée d’Anthropologie préhistorique de Monaco. C’est la première fois qu’il est présenté dans un musée en dehors de la Principauté.
La Grotte de Rouffignac (Dordogne) : des mammouths et encore des mammouths !
Alors que le mammouth laineux est secondaire dans l’art paléolithique, il occupe dans la grotte de Rouffignac une place prépondérante. Elle recèle 170 images de mammouths soit 30 % des figurations de cet animal dans lesgrottes ornées européennes.
Huit kilomètres de galeries sur trois niveaux en font l’une des plus vastes cavités du Périgord. Le réseau, à une entrée, fut d’abord fréquenté par les ours des cavernes dont les traces sont omniprésentes. Puis vinrent les artistes qui disséminèrent quelques 250 figurations animales sur trois kilomètres de couloirs. Aux mammouths ultra-dominants s’ajoutent bisons, chevaux, bouquetins et rhinocéros laineux. Cet art daté de la fin du Magdalénien moyen (il y a 16 000 ans) associe dessin, systématiquement noir, et gravure. Il est caractérisé par de véritables compositions. L’ensemble le plus riche est le Grand Plafond où 65 images s’entremêlent au-dessus
d’un puits accédant aux étages inférieurs de la caverne.
Le mammouth, la frise, le dessin noir notamment sont emblématiques de Rouffignac. Mais, d’autres grottes de la vallée de la Vézère présentent des similitudes (Bernifal, Font-de-Gaume et Combarelles) qui démontrent l’appartenance des auteurs à une même communauté.
Des mammouths et des Hommes
Si les premiers Hommes en Europe, dès 1,8 million d'années, ont côtoyé le mammouth méridional et l’ont sans doute occasionnellement consommé comme en témoignent les quelques traces qu’ils ont laissées sur certaines carcasses, c’est le mammouth laineux (Mammuthus primigenius) que les Hommes du Paléolithique supérieur (les premiers Homo sapiens) ont fréquenté.
Pour ces groupes humains, le mammouth laineux a représenté une ressource alimentaire mais il a également fourni des matières premières souples (peau, tendon) et dures (os, ivoire) pour la fabrication de divers objets (parure, art mobilier, armes, outils…) et la construction de structure d’habitation. L’ivoire a été débité ou travaillé par rainurage. Pour sculpter des représentations en ronde-bosse comme l’homme-lion aurignacien d’Holenstein-Stadel (Allemagne) ou les statuettes féminines du Gravettien (de -30 000 à -20 000 ans), c’est la dentine (au centre de la défense) qui a été utilisée. Il peut alors s’agir d’ivoire subfossile parfois plus facile à travailler. Dans l’art pariétal, les représentations de mammouth sont fréquentes indiquant la place importante de cet imposant animal dans l’imaginaire des Hommes qui l’ont connu jusqu’à sa disparition, du fait du réchauffement climatique, vers 12 000 ans avant notre ère et un peu plus tard dans les iles arctiques.
De gauche à droite : moulage d'une pendeloque en ivoire (Arcy-sur-Cure, Yonne, France), moulage d'une tête de statuette féminine en ivoire (Brassempouy, Landes, France), moulage d'une extréminté de propulseur avec sculpture de mammouth en bois de cervidé (Canecaude, Aude, France), moulage d'une cuillère avec décor incisé en bois de cervidé (Dolni Vestonice, République Tchèque) et moulage d'un fragment de défense de mammouth avec mammouth gravé (La Madeleine, Dordogne, France)
Le mammouth dans la culture populaire
Le mammouth est aujourd’hui un animal qui fascine, à la fois irréel car disparu et bien réel grâce à l’archéologie.
Dès l’Antiquité, les restes de mammouth intriguent et sont à l’origine de nombreuses légendes. Les os sont attribués à des créatures fabuleuses (géants, cyclopes, taupes, saints …) et les défenses à des licornes.
Depuis le XIXe siècle, le mammouth suscite un véritable engouement. Il est devenu l’animal emblématique de la Préhistoire et bénéficie d’un fort capital sympathie. Les artistes et publicitaires se sont emparés de son image. Il apparait ainsi dans de très nombreux films, dessins animés, bande-dessinées et livres, donne son nom à plusieurs groupes ou titres de musiques mais également journaux, émissions, réforme de l’éducation nationale ou encore supermarché.
Cet engouement nourrit également la volonté de chercheurs qui souhaitent tenter de ramener l’espèce à la vie. La science rattrapera-t-elle la fiction ?